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L'imagination de Pascal en lien avec Fontenelle au bac 2026

Analyse linéaire de Pascal, Pensées, fragment « L’Imagination » en lien avec Fontenelle Entretiens sur la pluralité des mondes

Le 25/08/2025 0

Dans Commentaires littéraires et études linéaires, bac 2026

Pascal et Fontenelle

Etude linéaire

 

Imagination. fragment vanité

Pascal

 

C’est cette partie dominante dans l’homme, cette maîtresse d’erreur et de fausseté, et d’autant plus fourbe qu’elle ne l’est pas toujours, car elle serait règle infaillible de vérité si elle l’était infaillible du mensonge. Mais étant le plus souvent fausse, elle ne donne aucune marque de sa qualité, marquant du même caractère le vrai et le faux. Je ne parle pas des fous, je parle des plus sages et c’est parmi eux que l’imagination a le grand droit de persuader les hommes. La raison a beau crier, elle ne peut mettre le prix aux choses. Cette superbe puissance ennemie de la raison, qui se plaît à la contrôler et à la dominer, pour montrer combien elle peut en toutes choses, a établi dans l’homme une seconde nature. Elle a ses heureux, ses malheureux, ses sains, ses malades, ses riches, ses pauvres. Elle fait croire, douter, nier la raison. Elle suspend les sens, elle les fait sentir. Elle a ses fous et ses sages, et rien ne nous dépite davantage que de voir qu’elle remplit ses hôtes d’une satisfaction bien autrement pleine et entière que la raison. Les habiles par imagination se plaisent tout autrement à eux-mêmes que les prudents ne se peuvent raisonnablement plaire. Ils regardent les gens avec empire, ils disputent avec hardiesse et confiance, les autres avec crainte et défiance. Et cette gaieté de visage leur donne souvent l’avantage dans l’opinion des écoutants, tant les sages imaginaires ont de faveur auprès des juges de même nature. Elle ne peut rendre sages les fous, mais elle les rend heureux, à l’envi de la raison, qui ne peut rendre ses amis que misérables, l’une les couvrant de gloire, l’autre de honte. Qui dispense la réputation, qui donne le respect et la vénération aux personnes, aux ouvrages, aux lois, aux grands, sinon cette faculté imaginante ? Combien toutes les richesses de la terre insuffisantes sans son consentement. Ne diriez-vous pas que ce magistrat dont la vieillesse vénérable impose le respect à tout un peuple se gouverne par une raison pure et sublime et qu’il juge des choses par leur nature sans s’arrêter à ces vaines circonstances qui ne blessent que l’imagination des faibles ? Voyez-le entrer dans un sermon où il apporte un zèle tout dévot, renforçant la solidité de sa raison par l’ardeur de sa charité. Le voilà prêt à l’ouïr avec un respect exemplaire. Que le prédicateur vienne à paraître, si la nature lui a donné une voix enrouée et un tour de visage bizarre, que son barbier l’ait mal rasé, si le hasard l’a encore barbouillé de surcroît, quelques grandes vérités qu’il annonce, je parie la perte de la gravité de notre sénateur. Le plus grand philosophe du monde sur une planche plus large qu’il ne faut, s’il y a au-dessous un précipice, quoique sa raison le convainque de sa sûreté, son imagination prévaudra. Plusieurs n’en sauraient soutenir la pensée sans pâlir et suer. Je ne veux pas rapporter tous ses effets. Qui ne sait que la vue des chats, des rats, l’écrasement d’un charbon, etc. emportent la raison hors des gonds. Le ton de voix impose aux plus sages et change un discours et un poème de force. L’affection ou la haine changent la justice de face. Et combien un avocat bien payé par avance trouve-t-il plus juste la cause qu’il plaide ! Combien son geste hardi la fait-il paraître meilleure aux juges dupés par cette apparence ! Plaisante raison qu’un vent manie et à tout sens ! Je rapporterais presque toutes les actions des hommes, qui ne branlent presque que par ses secousses. Car la raison a été obligée de céder, et la plus sage prend pour ses principes ceux que l’imagination des hommes a témérairement introduits en chaque lieu.

 

 

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Dans ce fragment tiré des Pensées, Pascal consacre une réflexion à l’imagination, qu’il décrit comme une puissance trompeuse, source d’illusions et d’erreurs. Ce texte illustre parfaitement le thème pascalien de la vanité humaine : l’homme croit agir selon la raison, mais il est en réalité dominé par ses représentations subjectives.

Problématique :
Comment Pascal met-il en lumière la puissance trompeuse de l’imagination et la vanité de la condition humaine face à la faiblesse de la raison ?

Tu peux aussi, selon les attentes de ton oral, simplifier ou varier légèrement :

  • En quoi ce fragment illustre-t-il la domination de l’imagination sur la raison ?
  • Comment Pascal dénonce-t-il le rôle illusoire de l’imagination dans les jugements humains ?


On peut lire ce texte en deux mouvements :

  • (lignes 1 à 20 environ) → L’imagination, puissance trompeuse qui domine la raison et façonne les jugements humains.
  • (de « Qui dispense la réputation… » à la fin) → Des exemples concrets qui révèlent la tyrannie de l’imagination dans tous les domaines (justice, morale, science, comportements).

 

1. L’imagination, maîtresse d’erreur et rivale de la raison

(du début : « C’est cette partie dominante… » jusqu’à « … auprès des juges de même nature »)

Ouverture du fragment : Pascal pose une thèse forte → l’imagination est une « maîtresse d’erreur et de fausseté ».

L’antithèse « si elle l’était infaillible du mensonge, elle serait règle de vérité » → paradoxe qui montre son ambiguïté.

Elle brouille les repères car elle marque « du même caractère le vrai et le faux » : absence de critère sûr.

Opposition entre imagination et raison :

La raison « a beau crier », mais l’imagination « persuade » → opposition des registres (raison faible, imagination séduisante).

Métaphore de la « superbe puissance ennemie de la raison » → personnification qui la fait apparaître comme une force tyrannique.

Imagination = seconde nature de l’homme :

Elle distribue statuts et valeurs (« heureux/malheureux, riches/pauvres »).

Elle impose des hiérarchies factices.

Critique sociale :

Les « habiles par imagination » s’imposent plus que les « prudents » guidés par la raison.

Champ lexical de la domination : « empire », « hardiesse », « confiance ».

L’illusion séduit davantage que la vérité rationnelle.

 Ce premier mouvement montre une thèse générale : l’imagination trompe, mais son pouvoir est irrésistible. Elle domine les hommes jusque dans leur perception des valeurs sociales.

2. Les manifestations concrètes de la tyrannie de l’imagination

(à partir de « Qui dispense la réputation… » jusqu’à la fin)

La réputation et les honneurs :

L’imagination donne le respect aux lois, aux grands, aux œuvres.

Exemple du magistrat : son autorité repose moins sur sa raison que sur son apparence (voix, visage, barbe mal rasée).

→ Ironie mordante de Pascal : la gravité du juge s’effondre devant un détail ridicule.

La force des apparences :

Exemple du philosophe sur une planche → sa raison lui dit qu’il ne risque rien, mais son imagination suscite peur et vertige.

Ici, Pascal montre la supériorité du sensible et du vécu sur le raisonnement abstrait.

Petites peurs et dégoûts : chats, rats, charbon écrasé → la raison « sort de ses gonds » pour des causes insignifiantes.

Les effets sur la justice et la vie sociale :

Ton de voix, gestes de l’avocat, corruption par l’argent → la justice est déformée par des apparences.

Antithèse finale : la raison est « manœuvrée par un vent » → image forte de sa faiblesse face à l’imagination.

 Ce second mouvement illustre par des exemples concrets et frappants la thèse initiale : l’imagination est une puissance universelle qui agit sur les comportements humains, bien plus que la raison.

Ce fragment illustre la pensée de Pascal sur la vanité de l’homme : persuadé d’agir selon la raison, il est en réalité le jouet d’une puissance trompeuse qui oriente ses jugements et ses comportements. L’imagination, « seconde nature », règne en maîtresse, et révèle la misère de la condition humaine.
Ce texte, par son usage d’images fortes, d’exemples concrets et de paradoxes, frappe le lecteur et le pousse à douter de ses propres certitudes.

 

Si tu étudies Entretiens sur la pluralité des mondes de Fontenelle, tu peux consulter

Analyse du conte de Voltaire, Micromégas

 

 

Lien Pascal (Pensées, « L’Imagination »)

 Fontenelle (Entretiens sur la pluralité des mondes)

 

Entretiens sur la pluralite des mondes fontenelle parcours bac le gout de la science

Bac 2026

1. Un rapport commun à la raison et à ses limites

  • Pascal : critique la vanité humaine → la raison est faible, dominée par l’imagination qui trompe les hommes et les détourne de la vérité.
  • Fontenelle : fait confiance à la raison et aux lois naturelles pour comprendre l’univers, mais il reconnaît la difficulté de convaincre → il utilise des images, des hypothèses, un style plaisant.
  •  Les deux montrent que la raison seule n’a pas toujours de prise : elle doit composer avec les passions, les apparences ou l’imagination.

2. L’imagination : ennemie chez Pascal, outil chez Fontenelle

  • Chez Pascal, l’imagination est une « maîtresse d’erreur », une puissance fourbe qui égare le jugement humain (ex. le magistrat qui perd sa gravité à cause d’un détail ridicule).
  • Chez Fontenelle, l’imagination est utilisée de manière positive : il met en scène une marquise curieuse, il invente des habitants des autres planètes → ce n’est pas pour tromper, mais pour séduire et éveiller la curiosité.
  •  Donc : l’imagination = source d’illusion (Pascal) / outil de pédagogie (Fontenelle).

3. Deux visions de la condition humaine

  • Pascal → Vision tragique : l’homme est misérable, trompé par ses propres facultés. La raison est impuissante.
  • Fontenelle → Vision optimiste : l’homme peut progresser par la raison, à condition de rendre la science attrayante. L’imagination sert alors à accompagner la raison au lieu de la pervertir.
  •  Opposition : Pascal met en avant la vanité et la faiblesse de l’homme, Fontenelle au contraire sa capacité d’apprendre et de s’ouvrir au monde.

Mettre en relation Pascal et Fontenelle permet de montrer deux attitudes face à l’imagination :

  • Pascal → défiance : elle ruine la raison, elle trompe.
  • Fontenelle → usage stratégique : elle attire l’attention, rend la science plaisante.
  • Ainsi, les deux auteurs posent la même question — quelle place accorder à l’imagination dans la connaissance humaine ? — mais y répondent de manière opposée : pour l’un elle est vanité, pour l’autre elle est moteur de curiosité.
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