Qui est Nathalie Sarraute?
Nathalie Sarraute née le 18 juillet 1900 en Russie et morte en 1999 à Paris est une écrivaine et avocate, l'une des figures du Nouveau Roman.
Dès 1939, Nathalie Sarraute fait publier Tropismes ce qui vaut à son auteur d'être considérée à l'instar d'Alain Robbe-Grillet, de Michel Butor et de Claude Simon comme un écrivain du Nouveau Roman.
Influencée par Marcel Proust, James Joyce et Virginia Woolf, elle rejette les conventions traditionnelles du roman héritées du réalisme avec Balzac, Stendhal et du naturalisme avec Zola, Maupassant, pour analyser dans Tropismes les imperceptibles réactions physiques, spontanées que suscitent les règles sociales et langagières.
"Mouvements indéfinissables qui glissent très rapidement aux limites de la conscience ; ils sont à l'origine de nos gestes, de nos paroles, des sentiments que nous manifestons, que nous croyons éprouver et qu'il est possible de définir".
Pour un oui ou pour un non est une pièce de théâtre de Nathalie Sarraute, créée comme pièce radiophonique en décembre 1981, publiée en 1982 et représentée pour la première fois au théâtre en 1986.
C'est la pièce la plus jouée de Nathalie Sarraute, avec plus de 600 représentations professionnelles depuis sa création.
Comment résumer la pièce?
Écrite en 1981, Pour un oui ou pour un non est la sixième pièce de théâtre de Nathalie Sarraute. Œuvre d’abord radiophonique, elle met en scène un échange entre deux hommes, deux amis, appelés sobrement H1 et H2. Au cœur d’un dispositif scénique très dépouillé, ils tentent de mettre à nu et de comprendre le petit rien venu gripper leur longue amitié. De mots en mots, de tâtonnements en tâtonnements, et devant H3 et F venus figurer pour un moment le tribunal des gens de bon sens, leurs rancœurs affleurent, macèrent, cristallisent et se durcissent.
De la conversation à la sous-conversation
Les personnages comme support du langage
Pour un oui ou pour un non met en scène quatre personnages, sans noms : H1, H2, H3, et F. H : signifiant homme, et F: signifiant femme. La pièce dévoile des entités indéfinies, pas d'identité, pas de personnalité. Simple support du langage, les personnages se disputent sur une scène vide, épurée, au décor absent pour valoriser la parole dans une pièce dont l'intrigue ne porte que sur la parole.
"C'est bien, ça"
Au cours d'une conversation entre deux amis, H1 et H2, l'un complimente l'autre en prononçant les mots « C'est bien, ça ».
La conversation devient alors un débat, puis un conflit, en se développant autour de l'interprétation de cette formule, trois mots dérisoires, du ton sur lequel elle a été prononcée et de ses connotations plus ou moins implicites. La phrase anodine se charge de tropismes, d'interprétations, de jugements et met l'amitié des deux hommes en péril.
Tout le drame de cette pièce tient en trois mots, une petite phrase bien banale chargée de connotations qui est au coeur de l'intrigue. Les phrases d'apparence anodine sont interprétées dans le but d'en extraire le sens caché de chaque mot, les malentendus les plus implicites, les silences les plus révélateurs. Ces sous-entendus à l'origine du duel verbal intensifient la violence du conflit.
Une écriture fragmentée
Une écriture liée à l'affectivité qui peine à définir
Des points de suspension (aposiopèses) pour accueilir les non-dits, mettre en avant les mots qui se perdent dans des phrases inachevées sont caractéristiques de la ponctuation de Nathalie Sarraute.
L'aposiopèse
Définition : suspension du discours au moyen du signe de ponctuation
Dans la petite phrase à l'origine du conflit, l'intervalle entre "c'est bien" et "ça" est marqué par les points de suspension, il traduit un temps, un étirement, un allongement.
⦁ H2. Soupire - Pas tout à fait ainsi... il y avait entre "C'est bien" et "ça" un intervalle plus grand : "C'est biiien.... ça". Un accent mis sur "bien".... un étirement : "biiien..." et un suspens avant que "ça" arrive... ce n'est pas sans importance...
Tirets, deux points, points de suspension sont à l'image d'une écriture fragmentée enrichie par le fréquent recours à l'indéfini, "quelque chose", "rien", "on", pour traduire la fragmentation encore renforcée par le recours aux énumérations.
Une mise en scène de l'incommunicabilité en épanorthoses, de nombreuses phrases juxtaposées sans connecteur logique, des interrogations, des négations, un langage parlé, l'efficacité de parole sarrautienne est remise en question.